Airbags Takata: pourquoi, malgré le rappel géant de Citroën, 30% des voitures n’ont pas encore été réparées


Plus d’un an après le début du rappel massif des C3 et DS3 à cause des airbags défectueux Takata, Citroën vient de durcir le processus. Ce mardi 17 juin, le constructeur a choisi "d’étendre [le] stop drive à tous les modèles C3 et DS3 concernés par cette campagne de rappel en France et en Europe produits entre 2014 et 2019".
Alors que certains véhicules n’étaient soumis qu’à un rappel classique -une lettre demandant aux propriétaires de ramener leur véhicule au garage pour procéder à l’échange de l’airbag- ces voitures ne doivent désormais plus être utilisées jusqu’au changement du système de sécurité. Ce durcissement fait suite à une demande du ministère des Transports, alors qu’une conductrice a perdu la vie le 11 juin après l’explosion de l’airbag de sa C3 près de Reims. Cette dernière était sous le coup du rappel, pas d'une injonction à ne pas circuler, car elle datait de 2014.
Citroën estime que 82.000 voitures de 2014 à 2019 rappelées en France sont concernées par ce stop drive et n’ont pas encore été réparés.
30% des C3 et DS3 encore à réparer en FranceUn an après le début de ce rappel massif chez Citroën, de nombreux véhicules n’ont donc pas encore été réparés. Selon les chiffres communiqués par Stellantis (maison-mère de Citroën) ce mardi, sur les 690.329 C3 et DS3 équipées d’airbags Takata en France, 481.000 ont vu leurs airbags remplacés, soit 69,7%.
Les 30% restants (dont les 82.000 voitures évoquées ci-dessus) n’ont donc pas encore vu leur airbag remplacé, explique Citroën. Selon TF1 Info, ce sont 2 millions de véhicules qui attendent au-delà de Citroën de voir leurs airbags remplacés.
Si une partie des clients informés par le constructeur ne s’est peut-être pas encore manifesté auprès de son garagiste, certains, comme la conductrice décédée le 11 juin, n’ont pas forcément reçu le courrier de rappel. Ce dernier, envoyé le 20 mai, a en effet été retourné car l’adresse communiquée n’était pas la bonne, précise le groupe automobile.
Le constructeur se base sur les adresses disponibles dans le fichier national des cartes grises. En cas de retour à l'envoyeur du courrier, le constructeur se tourne alors vers les assureurs pour retrouver la bonne adresse des clients et envoyer de nouveaux courriers en recommandé. Une opération chronophage.
C’est notamment pour éviter cet écueil que les conducteurs (de Citroën mais aussi d’autres marques) sont désormais informés lors de leur passage au contrôle technique que leur véhicule est soumis à un rappel pour un airbag Takata. Mais là encore, le temps de toucher tous les conducteurs concernés, des véhicules sont toujours sur la route.
La question du timing de ce rappel géant pose aussi question. Le rappel stop drive concernant les C3 et DS3 a été lancé au printemps 2024 et il n’était l’an dernier effectif qu’au sud d’une ligne Lyon-Clermont Ferrand. Le rappel a ensuite été étendu au nord du pays, mais sans stop drive en début d'année, avant de lancer cette procédure de stop drive pour tous les véhicules au nord du pays et en Europe ce mardi. Stellantis a donc géré plusieurs vagues de rappel successifs.
Plus précisément, dans la moitié sud du pays concernée par le stop drive dès le départ, 229.00 véhicules ont déjà été réparés depuis un an, mais 40.000 n’ont toujours pas été revus par les garagistes, nous explique Citroën. Etaient-elles déjà partie à la casse? Les propriétaires n’ont-ils pas reçu le courrier? L’ont-ils ignoré? Difficile de trouver une explication pour ces dizaines de milliers de véhicules.
"Par définition, un rappel ne se ferme jamais", souligne un porte-parole de Stellantis qui précise que si les propriétaires se manifestent même dans plusieurs années, leurs voitures seront bien réparées. "Il est important que les clients prennent contact avec nous", demande Xavier Chardon, directeur général de Citroën. Un site dédié (cliquez ici pour y accéder) permet de vérifier si le véhicule est concerné et de joindre le constructeur. Plus largement, le ministère des Transports a recensé les modèles concernés toutes marques confondues sur une page internet dédiée.
Les débuts chaotiques du rappel (manque d’airbags, de véhicules de remplacement, de créneaux de rendez-vous) posent cependant la question des moyens mis en œuvre: en clair, Citroën et Stellantis en ont-ils fait assez?
"Citroën sait qu’ils ne sont pas en mesure de faire face à un changement massif et immédiat des véhicules, alors ils saucissonnent, accuse sur BFMTV Maître Christophe Lèguevaques, avocat de victimes touchées par les airbags défectueux. L’an dernier c’était un découpage géographique, on a créé une ligne artificielle sud-nord et on a changé dans le sud. Et dans le nord, comme il y a encore plus de véhicules. Ils ont fait un découpage artificiel temporel: on va d’abord réparer les véhicules avant 2013".
Citroën a beaucoup communiqué depuis sur les moyens mis en place, les milliers de véhicules mis à disposition des clients, un grand plan pour accueillir notamment dans ses usines des clients afin de remplacer leurs airbags. La procédure semble rodée pour absorber rapidement cette nouvelle vague de remplacement d’airbags.
"On va faire au plus vite, résume sur TF1 Philippe Delanaux, un gérant de garage Peugeot Citroën en Moselle. Les véhicules vont effectivement être immobilisés. Sachant qu’on a traité de nombreux véhicules très rapidement, de gros volumes, aujourd’hui on arrivera à faire face très rapidement".

Dans les Drom-Com (nouvelle dénomination des Dom-Tom) où la campagne de réparation ne semble pas aussi efficace qu’en métropole (aucun taux de réparation des véhicules ne nous a par exemple été communiqué), Citroën dit poursuivre son travail d'information. Les autorités ont musclé le jeu.
Une campagne choc a ainsi été lancée en Guadeloupe, comme on peut le voir sur la page Facebook de la préfecture, pour inviter les automobilistes potentiellement concernés à ne pas prendre ce risque avec leur véhicule à la légère, avec un numéro vert et un QR Code permettant de faire une vérification directement via Whatsapp. Une démarche qui se veut plus efficace que le courrier.
Le gouvernement se penche de son côté sur les responsabilités de Stellantis dans cette affaire. "Cet accident pose notamment la question des analyses de risques réalisées par le constructeur", a estimé le ministère des Transports dans un communiqué.
L’annonce ce mardi de l'extention du stop drive -qui concerne donc maintenant toutes les C3 et DS3 au nord comme au sud de l’Europe- apporte peut-être une première réponse. Les dirigeants de Citroën vont eux être convoqués prochainement par le ministre alors que plusieurs procédures judiciaires sont actuellement ouvertes.
BFM TV