Automobile. André Citroën, mort il y a 90 ans et bientôt au Panthéon ?

Il y a 90 ans, le 3 juillet 1935, s’éteignait à Paris, l’industriel André Citroën, fondateur des automobiles du même nom. Si le nom est resté aujourd’hui, il faut se rappeler que l’homme a révolutionné l’industrie automobile, participé à l’effort de guerre, mis en place une politique sociale dans ses usines et donné à la femme une place entière. Une histoire à part, qui résonne encore 90 ans après. Au point d’entrer au Panthéon? C’est le souhait d’Henri-Jacques Citroen, son petit-fils.
C'est l'une des figures les plus importantes de l’industrie française, et son nom est certainement devenu une des marques automobiles les plus connues dans le monde et les voitures les plus collectionnées sur la planète. André Citroën est le cinquième et dernier enfant de Levie Bernard Citroën, diamantaire néerlandais de 35 ans, émigré à Paris en 1873, et d'Amalia Kleinmann, polonaise de 25 ans originaire de Varsovie.
Les débuts d’André CitroënLe nom Citroën provient du métier exercé par l'arrière-grand-père d'André, prénommé Roelof. En 1810, Napoléon annexe le Royaume des Pays-Bas. La famille juive n’a pas de nom de famille et doit se soumettre au code Napoléon en choisissant un nom.
Roelof se fait appeler Limoenman (« homme-citron »), surnom que ses clients lui donnaient. Le nom évoluera ensuite jusqu’à Citroen, « citron » en néerlandais. Plus tard, le jeune André entre au lycée Condorcet, sous le nom Citroën.
Le jeune homme souhaite peaufiner la prononciation de son nom de famille. Brillant élève, il intègre l'École polytechnique. En 1900, pour les vacances de Pâques, André Citroën rend visite à sa famille en Pologne et découvre une petite entreprise de mécanique qui fabrique des engrenages en dents taillées en V.
André achète le brevet de ces chevrons révolutionnaires. De retour en France, il met au point des outils équipés de chevrons en acier.
Sitôt la guerre déclarée, André est mobilisé en août 1914 en tant que lieutenant puis capitaine au 2e régiment d'artillerie de Grenoble. Sur la frontière Est où a lieu le conflit, il a l'occasion de constater le manque d'artillerie et de munitions face à l'ennemi.
La mort de son frère Bernard est un déclic. André propose au général Louis Baquet, de lancer sa propre usine d'obus. En à peine quatre mois il monte une usine immense sur des terrains vagues Quai de Javel. Malgré le rythme imposé par les usines, André Citroën est un des premiers industriels à se soucier du bien-être de ses ouvriers, qui sont souvent des ouvrières.
L'entreprise de munitions d'André Citroën est très vite réputée et devient un modèle d'organisation, d'efficacité et de responsabilité sociale. A la fin de la guerre, Citroën se lance dans l’automobile. Les automobiles Citroën naissent en 1919.
Un grand-père pas comme les autresHenri-Jacques Citroën est le petit-fils d’André. Difficile d’ignorer la ressemblance physique entre les deux hommes, entre l’allure, le visage, les mêmes lunettes rondes, ne manque que la moustache.
Enfant, Henri-Jacques a vite compris que son nom de famille avait une signification particulière : “Dès que j’ai su lire, j’ai vu ce nom sur des bâtiments, sur des voitures. Alors j’ai interrogé mes parents, posé des questions. Ensuite, à l’école quand votre nom est prononcé durant l’appel, ça intrigue, même les enfants. Parce que Citroën fait partie de la vie des français et pas seulement, depuis toujours. Il n’y a pas une famille française qui n’a pas possédé de Citroën. A la maison il y avait des objets, des souvenirs. Quand j’étais petit, j’entendais parler mes parents des actions entreprises pour corriger l'image d'André Citroën. Il y avait beaucoup de bêtises racontées sur mon grand-père. Notamment qu’il avait fait faillite parce qu’il jouait au casino, ce qui était totalement faux.” explique Henri-Jacques.
Après avoir travaillé, loin de l’automobile, pendant trente ans au Venezuela, où il conseille les entreprises françaises, Henri-Jacque Citroën rentre en France en 2015.
“J’étais toujours très attaché à la mémoire de mon grand-père. En août 2021, on annonce dans les médias que Joséphine Becker va être panthéonisée. Je me dis que Joséphine Baker est la copine de mon grand-père. Si elle entre au Panthéon, mon grand-père entre aussi, avec elle. Je me suis rendu à l’Elysée et on m’a dit que cette candidature pourrait être prise en compte et on m’a demandé qui était dans le comité de soutien. J’étais tout seul! J’ai donc commencé à créer ce comité de 65 personnes, qui a remis un manifeste au Président de la République, en septembre 2023.”
Pourquoi une Panthéonisation ?“André Citroën est une inspiration pour la Nation, surtout dans le contexte actuel de réindustrialisation de la France. Il a toujours été en quête de progrès technologique, pour toujours être à l’avant-garde. André Citroën à toujours œuvré dans le sens de la cohésion sociale. Tout ça en étant fils d’immigrés, avec un père hollandais et mère polonaise, et qui est devenu français lui-même à 18 ans pour pouvoir entrer à Polytechnique. Il épouse une Italienne, Georgina Bingen et crée en quelque sorte, une famille européenne. Ce serait le premier industriel à entrer au Panthéon. Une manière de rendre hommage à tous les entrepreneurs et chefs d’entreprise qui contribuent à créer de la force aux Français.” ajoute Henri-Jacques.
Le rôle de la femme“On pourrait aussi parler du renforcement du rôle de la femme. Il a toujours mis la femme en avant et accordé des conditions favorables pour qu’elles travaillent de la meilleure manière. Dans les années 30, il lance une campagne de publicité intitulée : “La femme moderne ne circule qu’en Citroën”.
A une époque où peu de femmes avaient le permis de conduire, c’était osé. C’était un super pied de nez et un sacré pari sur l’avenir. Cette campagne avait beaucoup choqué les conservateurs de l’époque qui disaient : “De quoi se mêle cet industriel ?” Il avait raison avant tout le monde.
Le Progres